mercredi 15 juin 2016

Rupture conventionnelle et poursuite du contrat de travail dans le cadre d'une mutation intra ou inter groupe

Actualité de la Cour de Cassation

Le 8 juin 2016, la Cour de Cassation a rendu un arrêt très intéressant sur le champ d'application de l'article  L1237-11 du code du travail.
Je vous invite à découvrir la note explicative concernant cette décision :


"L’art. L1237-11 du code du travail (rupture conventionnelle) ne s’applique pas à une convention conclue entre un salarié et deux employeurs successifs organisant la poursuite du contrat de travail (08.06.16)

Arrêt n° 1042 du 8 juin 2016 de la Chambre sociale

La loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 a créé un nouveau mode de rupture bilatérale du contrat de travail qu’elle encadre de manière spécifique : la rupture conventionnelle.

La rupture d’un commun accord du contrat de travail étant désormais expressément prévue et réglementée par le code du travail, la chambre sociale a jugé, en application du principe specialia generalibus derogant que, sauf dispositions légales contraires, la rupture du contrat de travail ne peut intervenir que dans les conditions prévues par les articles L. 1237-11 et suivants du code du travail relatifs à la rupture conventionnelle (Soc. 15 octobre 2014, pourvoi n° 11-22.251, Bull. 2014, V, n° 241).

La question s’était rapidement posée, après cet arrêt du 15 octobre 2014, de ses conséquences sur les mutations intra ou inter groupes et sur les transferts conventionnels de contrats de travail.

Ces mutations ou ces transferts conventionnels de contrat de travail prennent en effet très souvent la forme d’une convention tripartite signée entre le salarié et ses deux employeurs successifs, aux termes de laquelle il est, d’une part, mis fin au contrat de travail initial avec le premier employeur, d’autre part, conclu un nouveau contrat de travail avec le nouvel employeur.

Dès lors que cette convention tripartite fait apparaître la rupture d’un commun accord du premier contrat de travail, faut-il que les règles relatives à la rupture conventionnelle, qui prévoient notamment la tenue d’un entretien entre le salarié et l’employeur, l’homologation de la convention de rupture par l’administration, et qui ouvrent droit au versement, au profit du salarié, d’une indemnité dont le montant est au moins équivalent à l’indemnité de licenciement, soient respectées ?

La chambre sociale répond, dans la présente décision, par la négative à cette question, jugeant que les dispositions de l’article L. 1237-11 du code du travail relatives à la rupture conventionnelle entre un salarié et son employeur ne sont pas applicables à une convention tripartite conclue entre un salarié et deux employeurs successifs ayant pour objet d’organiser, non pas la rupture du contrat, mais sa poursuite.

La ratio legis des règles relatives à la rupture conventionnelle est en effet de sécuriser la rupture du contrat de travail qui entraîne la perte définitive de l’emploi.

Les conventions tripartites, qui opèrent le transfert du contrat de travail d’un salarié au profit d’un nouvel employeur, ont quant à elles pour objet de garantir à l’intéressé la continuité de la relation de travail.

Rien ne justifiait donc que les dispositions du code du travail relatives à la rupture conventionnelle s’appliquent à ces conventions tripartites, sans que l’on puisse pour autant en conclure que la présente décision serait en contradiction avec l’arrêt rendu par la chambre sociale le 15 octobre 2014, qui ne visait que la rupture du contrat de travail emportant la perte définitive de l’emploi."

Benoît VETTES - Avocat en droit du travail 

Depuis de nombreuses années j'interviens pour les salariés et pour les entreprises afin de résoudre les difficultés en droit du travail.(licenciement, action prud’homale, conflits avec les organismes sociaux, etc...)

J'interviens également en mission de conseil pour les services des ressources humaines des entreprises.

Rédaction des contrats de travail, rupture conventionnelle, licenciement, maladie professionnelle, inaptitude, etc... constituent le quotidien de mon activité

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lundi 18 avril 2016

L'utilisation d'internet et vie privée du salarié





Revue de presse

Je vous transmets un article publié dans le numéro 49 de la revue "Votre Avocat vous informe" rédigée par les Editions DALLOZ en collaboration avec le CNB.

Bonne lecture!

"DROIT INTERNATIONAL ET COMMUNAUTAIRE :  Surveillance de l’utilisation d’internet et vie privée du salarié

La surveillance de l’utilisation d’internet par un salarié sur le lieu et pendant les heures de travail met en jeu le droit au respect de la vie privée et de la correspondance garanti par l’article 8 de la convention européenne.

Toutefois, il n’est pas déraisonnable de vouloir vérifier que les employés achèvent leurs tâches professionnelles.

Dans l’affaire Bărbulescu v. Romania, un employeur avait installé pendant neuf jours un logiciel espion sur l’ordinateur professionnel d’un salarié et enregistrait toute l’activité de ce dernier.

Au cours de ces neuf jours, il a remarqué que le salarié avait utilisé le compte Yahoo Messenger, ouvert par le salarié à la demande de l’employeur, à des fins personnelles.

Le salarié a nié avoir envoyé des mails personnels avec ce compte normalement dédié aux communications avec les clients de l’entreprise.
En réponse à cette affirmation, l’employeur a communiqué des transcriptions de messages envoyés par le salarié à son frère et à sa fiancée via la messagerie instantanée du compte Yahoo. On relèvera que les messages portés sur des données « sensibles » au sens de la loi n° 677/2001 et de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 (relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données) puisque, dans les transcriptions des messages, l’état de santé et la vie sexuelle du salarié étaient évoqués.

Si, devant les juridictions internes, le salarié poursuivait son employeur, c’est bien l’État roumain qui était en cause devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) au titre des obligations positives découlant de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. La CEDH devait donc déterminer si l’État roumain avait ménagé un juste équilibre entre le droit du requérant au respect de sa vie privée et de sa correspondance et les intérêts de son employeur.

La Cour retient l’absence de violation de l’article 8 de la Convention. Elle note que les juridictions internes ont accordé une attention particulière au fait que l’employeur avait accédé au compte Yahoo Messenger du requérant dans la croyance sincère qu’il contenait des messages strictement professionnels, dans la mesure où le salarié lui avait affirmé ne pas avoir utilisé le compte à des fins personnelles. Il en résulte que l’employeur a agi conformément à son pouvoir disciplinaire. Quant à l’utilisation des transcriptions des communications du requérant dans le cadre de la procédure, elle n’a, pour la CEDH, pas porté atteinte à la vie privée du salarié dans la mesure où les juridictions internes n’ont révélé dans leur décision ni le contenu des messages ni leur destinataire et que les transcriptions n’ont été utilisées que pour prouver la violation du règlement intérieur de l’entreprise prohibant l’utilisation des équipements pendant les heures de travail.

Finalement, la Cour estime qu’il n’est pas déraisonnable pour un employeur de vouloir vérifier que les salariés achèvent leurs tâches professionnelles pendant les heures ouvrables. En outre, les juges européens remarquent que les données et documents qui ont été stockés sur l’ordinateur n’ont pas été examinés par l’employeur dont la surveillance présentait donc une portée limitée et proportionnée.

 CEDH 12 janv. 2016,
Bărbulescu v. Romania,
req. n° 61496/08

Benoît VETTES - Avocat en droit du travail 

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vendredi 5 février 2016

Quels délais pour effectuer une visite d'embauche? Quelles sanctions en cas d'absence de visite d'embauche?


L'article R4624-10 du Code du Travail , modifié par Décret n°2012-135 du 30 janvier 2012 - art. 1, répond à cette question qui peut sembler anodine :

"Le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail.

Les salariés soumis à une surveillance médicale renforcée en application des dispositions de l'article R. 4624-18 ainsi que ceux qui exercent l'une des fonctions mentionnées à l'article L. 6511-1 du code des transports bénéficient de cet examen avant leur embauche."

Dans le cas général, cette visite d'embauche doit intervenir avant l'expiration de la période d'essai .

Il est important de comprendre que l'employeur doit bien s'assurer que cette visite  a eu lieu, même si l'envoi de la déclaration préalable à l'embauche génère automatiquement une demande de visite médicale.

Quelles sanctions?

L'absence de visite médicale d'embauche constitue une infraction de 5ème catégorie prévue à l'article R4745-3  du Code du travail.

La chambre criminelle de la Cour de cassation rappelle dans deux arrêts du mois de janvier 2016 qu'il appartient à l’employeur de s'assurer que cette visite à bien eu lieu.

Pour information, l'Inspection du Travail a relevé dans la première situation 294 infractions, et 36 infractions dans le seconde situation.

Ce qu'il faut retenir :
  • L'envoi à l'URSSAF de la déclaration unique d'embauche, comprenant une demande d'examen médical d'embauche, ne dispense pas l'employeur d'assurer l'effectivité de cet examen.
  • L''absence de visite médicale d’embauche, même pour des contrats de très courte durée, entraîne la mise en œuvre de la responsabilité pénale de l’employeur.
  Cass. crim., 12 janv. 2016, n° 14-87.696
  Cass. crim., 12 janv. 2016, n° 14-87.695

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mercredi 27 janvier 2016

Auto-entrepreneur ou travail dissimulé?


Revue de Presse 

Le statut d'auto-entrepreneur détourné par des entreprises génère un nouveau contentieux.
Je vous invite à découvrir  le commentaire de l'arrêt rendu le 15 décembre 2015,  et publié le 21 janvier 2016 - Direction de l'information légale et administrative (Premier ministre)

"Un auto-entrepreneur doit être un vrai auto-entrepreneur

L'employeur qui fait travailler ses anciens salariés sous le statut d'auto-entrepreneurs, dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à son égard, se rend coupable de travail dissimulé. C'est ce qu'a jugé la Cour de cassation le 15 décembre 2015.

Une enquête de l'inspection du travail effectuée au sein d'une société de téléprospection téléphonique avait révélé que des salariés avaient à la demande de l'employeur quitté celle-ci, pour travailler en tant qu'auto-entrepreneurs exclusivement pour le compte de leur ancien employeur.

Ils exerçaient dans le cadre d'un contrat type , commun à tous, et selon un mode de rémunération identique. Les modalités d'exécution du travail leur étaient imposées par l'entreprise « donneur d'ordre » (obligation de respecter l'utilisation d'une liste des clients à démarcher ainsi qu'une procédure commerciale précisément définie à l'avance). Enfin, c'était l'entreprise elle-même qui établissait les factures dont elle était débitrice à l'égard des auto-entrepreneurs.

La justice a considéré que ces auto-entrepreneurs fournissaient en réalité à l'entreprise des prestations dans des conditions qui les plaçaient dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard de celle-ci, et qu'en conséquence l'infraction de travail dissimulé était constituée."


Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 15 décembre 2015, 14-85.638

Les conséquences du détournement du statut de l'auto-entrepreneur par une entreprise donneuse d'ordres sont lourdement sanctionnées.

Vous souhaitez des informations sur ce statut et son utilisation?

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